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15 Juin 2023 / Editorial

50 ans : Le contexte socio-historique

Extrait de l'ouvrage : Histoire de la SFMG

La SFMG fête son demi-siècle : 1973 - 2023

Trois dates illustrent schématiquement la progressive marginalisation de la médecine générale en France : 1958 1968 1971, avant le sursaut et la création de la SFMG en 1973.


1958, une date clé dans l’organisation des soins en France

La réforme hospitalière du 30 décembre 1958 dite des ordonnances Debré est indiscutablement une date clé pour la médecine en France. Ses conséquences sont encore perceptibles de nos jours sur l’organisation des soins. Les centres hospitalo-universitaires (CHU) sont créés par le rapprochement des fonctions universitaires de recherche et d'enseignement et des hôpitaux. Cette réforme décisive instaure le temps plein hospitalo-universitaire autour d’un triptyque : activité de soins, d’enseignement et de recherche dans le cadre hospitalier, consacrant le monopole des médecins hospitalo-universitaires sur la formation de tous les médecins. Rien n’est prévu pour la médecine générale qui, hors les murs de l’hôpital et de l’université, est réduite à une activité de soins sans recherche ni enseignement spécifique. Les médecins généralistes font de plus en plus figure de cliniciens aux mains nues.
Face à la spécialisation de la médecine, la médecine générale tend à perdre sa cohérence épistémologique. Son champ n’est pas défini, son corpus théorique imprécis... Elle ne se distingue donc en creux par rapport au développement des spécialités : la médecine courante est devenue « générale » sans qu’un territoire propre lui soit attribué.


Dans l’enseignement, le cap de 68 !

La loi d’orientation de l’enseignement supérieur de 1968, dite loi Edgar Faure, modifie le déroulement des études universitaires. Les facultés deviennent des Unités d’Enseignement et de Recherche (UER) avec davantage d’autonomie. Elles deviendront en 1984, avec la loi dite Savary, des Unités de Formation et de Recherche (UFR).
Les futurs médecins généralistes sont formés en CHU à des démarches diagnostiques et à des stratégies thérapeutiques hospitalières et par des médecins qui ne pratiquent pas la médecine générale. Faute d’une formation réellement en rapport avec leur futur exercice, ils apprennent leur métier lors des remplacements, voire de l’installation.
L’inadéquation entre formation et pratique est renforcée par les enseignements baptisés post-universitaires (EPU). Dans la logique de la réforme Debré, les EPU sont organisées autour d’une expertise hospitalo-centrée, et pour une grande part CHU-centrée. Ces EPU portent davantage sur les connaissances médicales que sur la réflexion d’une pratique professionnelle, générant une discordance entre les matières enseignées et les besoins en formation continue des médecins praticiens.


Pour l’organisation professionnelle, c’est 1971

La première convention nationale qui régit les liens entre les médecins libéraux et l'assurance maladie date de 1971. Elle est signée entre la Confédération des Syndicats Médicaux Français (CSMF) et la CNAMTS. Le tarif de la consultation devient alors national. Il est d’emblée souligné : le libre choix du médecin, la liberté de prescription, le secret professionnel et le paiement à l'acte remboursé, ainsi que le souci de la qualité des soins qui doivent être consciencieux, éclairés, attentifs, prudents et conformes aux données actuelles de la science. En échange de ces tarifs réglementés, les médecins obtiennent le financement de leur assurance maladie et assurance vieillesse.
Rapidement au cours des successives conventions, les généralistes, malgré leur nombre, se retrouvent marginalisés, enfermés dans un paiement à l’acte limité à quelques « lettres clés » : C, V… alors que leurs confrères spécialistes s’emploient à développer la nomenclature tarifaire des actes techniques.


Naissance d’une identité généraliste en France

Il apparait donc qu’en France au début des années 1970, contrairement à la plupart des autres pays européens, la discipline est en difficulté et que ces difficultés sont multiples. C’est dans ce contexte défavorable que la SFMG va voir le jour en 1973.
En effet, quelques initiatives commencent à apparaitre en France dans la deuxième moitié des années 60. Des généralistes sortent de leur isolement. En s’associant ils créent les premiers groupes médicaux, qui seront le ferment d’une réflexion professionnelle. Les idées de Michael Balint pénètrent dans notre pays avec la création des groupes Balint. Et puis en 1973 apparait la Société Française de Médecine Générale ! Oscar Rosowsky, (Membre fondateur de la SFMG) résumait très bien en 1990, lors d’un séminaire à Poitiers, sa genèse : « Des groupes Balint ont commencé à se développer en France à partir de 1964. Lorsque les médecins généralistes, notamment ceux de Paris et de sa couronne tenteront, dans les années 68 de s’opposer à l’établissement d’une convention nationale les privant de toute l’influence qu’ils possédaient encore dans les conventions départementales, on trouvera nombre de généralistes balintiens dans le Comité intersyndical de liaison et d’action des médecins omnipraticiens et généralistes. Durant les trois années de travail intense que nous avait imposé notre lutte, nous avons pris vraiment conscience de l’existence d’une différence fondamentale entre la pratique du généraliste et celle du spécialiste. Et il nous est apparu nécessaire de créer un lieu de réflexion sur notre pratique. Nous avons opté pour une société savante. Ainsi est née en 1973 la SFMG dont l’unique préoccupation est la sauvegarde, la transmission et le développement du savoir en médecine générale ».



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