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17 Sept. 2020 / Editorial

COVID : l’absence cruelle d’épidémiologie de terrain. Qu'est devenu le projet "plateforme" ?

Olivier Kandel

Il y a 10 ans, la SFMG prenait la décision de fermer son entrepôt de données en mettant fin à l'aventure de l'Observatoire de la Médecine Générale (OMG).

L'OMG c'était 18 ans de recueil de données, entre 75 et 150 investigateurs, plus de 850 000 patients, 8 millions d’actes et 10 millions de diagnostics pris en charge (1) et de nombreuses publications (2). Lors d'un conseil d'administration fin 2010, la SFMG décidait de mettre à la disposition de la profession, l'observatoire et son savoir-faire. Cette proposition était solennellement soumise au Collège de la Médecine Générale (3).

Lors de son congrès annuel de 2017, le CNGE lançait officiellement en grande pompe lors d'une plénière, un réseau de recueil national en médecine générale, baptisé "Plateforme". L’optimisme était alors de mise, puisque le directeur de la CNAM-TS n’avait exprimé qu’une seule condition au financement de ce projet : qu’il soit porté par le Collège de la Médecine Générale. Cette exigence ne devait pas poser de problème. La SFMG s'en est immédiatement réjouit, en informant les promoteurs qu'elle était prête à contribuer, à sa place, à la réussite de ce projet (4).

Dix ans après la fermeture de l'OMG et trois après le lancement de "Plateforme", qu'est devenu ce projet ?

Connaissant bien l'intérêt d'un entrepôt de données et la richesse qu'il représente pour la médecine générale, ce retard est dangereux. Dangereux car il décourage les ressources humaines sur le terrain qui croyaient pouvoir participer à cette expérience. Dangereux car d'autres structures, peu philanthropes, prennent de l'avance (on pense entre autre à Doctololib et son très prochain logiciel médical…).

Pourtant, la crise épidémique que nous traversons montre bien l'intérêt qu'aurait eu un réseau de médecins (5). Le Ségur de la Santé organisé par le gouvernement pouvait donner l'occasion de formaliser cette impérative nécessité. Certes l'essentiel des subsides alloués seront investis dans l'hôpital, mais il faudra bien au final, "armer" le bras de la médecine ambulatoire, au risque de désorganiser une nouvelle fois le dispositif sanitaire dans notre pays. Le second des quatre piliers de cette concertation nationale voulait : définir une nouvelle politique d’investissement et de financement au service des soins.

L’absence d’un réseau national de recueil ambulatoire fait, en cette rentrée, cruellement défaut. Il est incompréhensible qu’il ne fasse pas partie du dispositif de gestion de crise. Nous savons bien que la Direction Générale de la Santé a toujours eu une vision monoculaire du dispositif sanitaire de notre pays et que les soins ambulatoires sont absents de leurs radars. Cependant, Monsieur Revel, ex-directeur de la CNAM-TS et nouveau directeur de cabinet du premier ministre, connait bien les soins ambulatoires. Il apportera peut-être un regard plus global sur l’organisation de notre système de santé.

Le Collège National des Généraliste Enseignants (porteur du projet Plateforme) et le Collège de la Médecine Générale pourraient se rencontrer sans tarder pour faire une nouvelle proposition qui puisse être portée par la profession et soumise sans délai au ministère. Personne n’imagine comment un tel réseau de recueil ne bénéficierait pas d’un large soutien en ce moment.

En espérant enfin pouvoir aboutir sur un projet qui fait une nouvelle fois cruellement défaut, sachez que la SFMG reste disposée à s’y investir.
Bien amicalement.

Olivier Kandel
Membre titulaire de la SFMG
Ces propos n'engagent que l'auteur


(1) Ades A. Une description de la médecine générale par l’analyse d’un recueil de données en continu. Revue de la littérature sur l’Observatoire de Médecine Générale. Thèse accessible sur site de la SFMG.
(2) Quelques publications référencées dans PubMed.
(3) Communiqué de presse de la SFMG.
(4) Editorial : La SFMG au Congrès du CNGE où l'on reparle d'un réseau de recueil en médecine générale. 12/2017.
(4) Chouilly J. La clinique covid, une incertitude diagnostique gérée par des hyper-spécialistes ! Editorial sur le site de la SFMG.

 
 


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